Les réalités et les mythes liés à la mer
Les Armes de la Capitale traitent la mer à la fois comme alliée et comme ennemie. Certes, l’étendue marine qui contient un monde de ressources est le pont qui lie les États. Elle étale sur les rivages sa beauté. Elle attire. Elle effraie. En temps de paix, au Cap-Henry avec sa mer - comme la montagne du temps du marronnage – il fait bon vivre.
L’Armorial reprend, dans seulement quatre blasons, le thème marin. Les héraldistes, s’inspirant de la mythologique d’ailleurs et d’ici, peuplent la mer d’êtres surnaturels qui ont le pouvoir de protéger le royaume. Par exemple, le blason du grand amiral d’Hayti, adopte le trident, arme de Neptune. Celui du secrétaire général du grand amiral fait appel, dans sa devise, au gréco-romain régnant sur les eaux, Neptune, et à la maîtresse du destin, Fortuna. Celui du chef de division de la marine est meublé d’une sirène, Simbi, mère haïtienne des eaux. Celui du contre-amiral est soutenu par le cheval, symbole du dieu grec de la mer Poséidon.
Les Armes comme reflet de l’histoire politique
et militaire du Cap
Les Hercules se sont battus pour que le Cap-Henry reste le défenseur de la liberté et de l’indépendance. En 1791 déjà, L. F. Sonthonax (1763 – 1813) proclame au Cap l’affranchissement des esclaves de Saint-Domingue. En 1793, ce sera l’abolition de l’esclavage. En 1802, Christophe, militaire de carrière, refuse de livrer la ville au général français Leclerc (1772 - 1802).
Le Cap-Henry, lieu stratégique, est protégé par les forts Picolet, Saint-Joseph, Saint-Michel, Magny... Le principal, Vertières, témoigne de la bataille mémorable de novembre 1803 qui marque la fin victorieuse de la révolution haïtienne. Cet acquis politique, défendu par les militaires et la Marine royale d’Henry Ier, a déterminé le choix iconographique des Armes de la Capitale.
Henry Ier adopte une politique extérieure active et habile. Il veut redorer son blason et réhabiliter l’image de la monarchie. Il crée des postes de secrétaires et d’écrivains du roi. Il nomme Joseph Rouanez (d. 1811), duc de Morin, secrétaire d’état aux relations extérieures. Le baron de Vastey (1781 - 1820) a la charge des écrits de propagande et d’informations. Il rédige procès-verbaux et comptes rendus, pamphlets, brochures, articles de journaux… qu’il fait imprimer pour diffusion sur place et en Europe.
Henry Ier entretient une importante correspondance avec des abolitionnistes britanniques dont Thomas Clarkson (1760-1846) et William Wilberforce (1759-1833). Grâce à ces échanges et le soutien de Zachary Macaulay (1768-1838), Henry Ier a pu recevoir des spécialistes britanniques dont le riche royaume avait besoin. Des médecins, des peintres, des ingénieurs, des professeurs, etc. sont venus pour soutenir le grand projet civilisateur de la monarchie.
Les Armes en témoignage
de la prospérité économique du royaume
Les activités maritimes du Royaume du Nord enrichissent le Cap-Henry qui s’ouvre sur le monde. La ville contrôle son commerce, source de sa prospérité. Et, l’afflux de biens exige de battre monnaie. Les pièces à l’effigie du roi Henry 1er représentent l’image du premier monarque du Nouveau Monde.
J.C. Dorsainvil (1880–1942) fait une liste des actes royaux qui organisent le royaume. Le principal, le Code Henry (1812), publie neuf lois (civile, criminelle, pénale, militaire, correctionnelle, etc.). La loi sur l’agriculture fixe les obligations des grands propriétaires terriens et des cultivateurs, ouvriers agricoles. Un tiers des revenus de ce système de production est remis à l’État. Et, les Royal Dahomey, corps de police rurale, veillent à l’application stricte des règlements. La loi de commerce régit le commerce maritime national et international. L’Angleterre, la France, l’Allemagne, la Hollande, la Suède et les États-Unis deviennent des partenaires commerciaux.
Les Armes pour conter
la vie religieuse, sociale et culturelle
Le roi bâtisseur impressionne avec la construction de châteaux, de palais et d’une citadelle. Écoutons Sir Rowley (1770-1845) qui est reçu avec les honneurs à la cour du roi en 1811. La reine, ses enfants, la famille royale et d’autres proches assistent à cette réception. L’amiral britannique, est charmé. Le raffinement de ses hôtes l’a frappé. Il vante les habits de gala rehaussés de velours et d’or. Il se régale du dîner à la française.
La prospérité s’est installée dans le quotidien. Vie intellectuelle. Chasse. Voyages. Musique et Opéra. Théâtre... Les saints catholiques sont célébrés. À la capitale, chaque 15 août, Notre-Dame de l’Assomption est à l’honneur. Le royaume d’Henry Ier rivalise avec les monarchies européennes. Une manière de proclamer que ces anciens esclaves qui dirigent leur petit pays maîtrisent parfaitement les codes et les manières des nations dites «civilisées».