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Irène François-Péan (1930-2016) (Stanley Péan)

Née au Cap-Haïtien le 29 juillet 1930, deuxième des trois filles d’un père mécanicien (Éberle François) et d’une mère brodeuse (Jeanne Oswald-Durand), arrière-petite-fille du poète national Alexis Oswald-Durand, Irène François a fait ses études primaires puis secondaires à l’École des sœurs bleues, puis poursuivi en 1946 ses études au Lycée Philippe-Guerrier. Elle a été de la première promotion de filles admises dans cette institution, jusqu’alors exclusivement réservée aux garçons.

Au cours de ses années au Lycée, la jeune Irène a étudié le dessin et l’aquarelle sous le tutorat du peintre capois de renom, René Vincent. Constatant les talents de son élève, Vincent lui a conseillé de s’inscrire au Centre d’Art du Cap, où elle a été initiée à la peinture à l’huile, sous la direction de madame Hélène Schomberg.

Mariée en décembre 1950 à Maurice Péan, Irène François-Péan s’est installée avec sa famille l’année suivante à Port-au-Prince, et y est demeurée jusqu’à son départ au Canada à l’automne 1966. Après quelques années consacrées à l’enseignement des sciences, elle a repris ses pinceaux au début des années 1980. En 1983, elle organise son premier vernissage en solo à Montréal, inaugurant une exposition privée. En 1984, elle a vu son œuvre Trieuse de café (aquarelle sur papier Arches) primée au concours Tout l’art du monde organisé par le ministère des Communautés culturelles et de l’Immigration du Québec : la toile compte parmi les 40 retenues (sur les 263 soumises au concours) et acquises pour la collection permanente du Gouvernement du Québec.

Un an plus tard, Irène François-Péan a pris part à l’exposition-prétexte à la clôture de la Décennie des femmes, mettant de l’avant une trentaine d’artistes issues des communautés culturelles. Du 28 novembre au 22 décembre 1985, l’exposition Regards sur 31 femmes artistes de la collection Tout l’Art du monde (Montréal, Place du Parc) s’attarde sur la démarche artistique de ces artistes. Dans le catalogue de l’exposition, on peut lire : « Les aquarelles d’Irène Péan traduisent la réalité haïtienne et s’inscrivent bien dans la tradition de cet art »(2).

En 1986, la Capoise participe à une exposition collective à la Galerie l’Art vivant de Montréal, lors du Salon d’automne du petit format et de la miniature. Installée à partir de 1990 dans la ville de Québec, après des années au Saguenay, Irène François-Péan, inscrite à l’Université Laval, s’est initiée à l’aquarelle abstraite ou non-figurative sous la direction du peintre et architecte mexicain, Emilio Vegas-Martin tout en poursuivant des études en Histoire de l’art. En 1992, elle a réalisé sa première exposition-solo à Québec, au Café-Bar-Galerie Tango.

De passage dans sa ville natale en 1997, Irène François-Péan s’est prêtée, le samedi 15 novembre, à une présentation privée de ses aquarelles abstraites à l’invitation de l’Alliance française du Cap-Haïtien.

Toujours à l’invitation de l’Alliance française (photo jointe), elle a organisé une exposition solo de ses aquarelles figuratives, du 4 au 18 juillet 1998. Par la suite, dans le cadre des activités culturelles de l’Alliance française, elle a animé des ateliers d’initiation à l’aquarelle pour une quinzaine de jeunes Capois.

Dans les années 2000, Irène François-Péan est devenue membre de l’Atelier d’aquarelle de Québec (AAQ), organisme sans but lucratif fondé en 1987 par son ami l’aquarelliste Olivier Toupin, visant à regrouper, stimuler et encourager les aquarellistes en partageant savoir, expérience et expérimentation. Dans ce cadre, elle a pris part à de nombreux ateliers de perfectionnement avec des artistes québécois de renom. Jusqu’en 2012, elle a collaboré régulièrement aux expositions collectives organisées par l’Atelier d’aquarelle de Québec.

L’œuvre d’Irène François-Péan
Il est incontestable que les écoles congréganistes d’abord et les enseignements apportés au Centre d’art ensuite ont conduit des artistes haïtiens à la pratique de l’aquarelle. Au centre surtout, les instructeurs haïtiens et étrangers peignaient eux-mêmes à l’aquarelle. Les élèves alors ont suivi. (1)

Le parcours artistique d’Irène François-Péan traduit cette réalité. C’est un art difficile à maîtriser misant sur la luminosité et la transparence. Pratique et rapide, l’aquarelle appartient aux techniques les plus utilisées qui mettent en valeur la combinaison de couleurs. En effet, malgré qu’il s’agisse de peinture à l’eau, une fois le tableau sec, il est pratiquement impossible de faire des corrections. De ce fait, elle demande d’avoir le geste vigoureux, certain et précis mais aussi la maîtrise des contrastes.

Malgré les exigences de la pratique de l’aquarelle, Irène François-Péan a choisi de s’y consacrer quasi-exclusivement lorsqu’elle a repris ses pinceaux dans les années 1980. Elle a utilisé ces techniques pour dépeindre tant les scènes de la vie quotidienne dans son pays natal, où des personnages coiffés de chapeaux et de foulards pratiquent divers métiers courants, des natures mortes ou de paysages de son pays d’adoption en toutes saisons.

…Encore faut-il que l’artiste en ait une parfaite maîtrise, car à cause de cette transparence qui la caractérise, le travail avec l’aquarelle ne permet pas de correction (3), fait encore remarquer Gérald Alexis.

Ses compositions sont harmonieuses, alliances de sobriété et de richesse. À travers ses natures mortes, par exemple, elle a créé des atmosphères douces et feutrées. Il en émane une impression d’intimité sereine. Les couleurs chaudes dominent sa palette et donnent vie aux objets, aux personnages et aux scènes du quotidien. Ses tableaux sont lumineux résultant de l’harmonie des couleurs et des teintes chaudes dominantes dégageant sérénité, convivialité et douceur.

La trieuse de café
  • Titre: La trieuse de café
  • Medium: Aquarelle sur papier d'arches
  • Collection: Gouvernement du Québec
Kachimbo I
  • Titre: Kachimbo I
  • Medium: Aquarelle sur papier d'Arche
  • Dimensions: 8" x 11"
  • Collection: Collection M.-J. Péan
Kachimbo II
  • Titre: Kachimbo II
  • Medium: Aquarelle sur papier d'arches
  • Dimensions: 7" x 9"
  • Collection: Collection de M.-J. Péan
Sérénité
  • Titre: Sérénité
  • Médium: Aquarelle sur papier d'arches
  • Dimension: 10" x 16"
  • Collection: Collection privée
Étude Le marchand de pâtés
  • Titre: Étude - Le marchand de pätés
  • Medium: Aquarelle sur papier d'arche
  • Dimensions 24" x 30"
  • Collection: Collection privée
Étude Viel homme et son coq
  • Titre: Étude - Viel homme et son coq
  • Medium: Aquarelle
  • Collection: Collection Privée
Nap chèche la vi
  • Titre: Nap chèche la vi
  • Medium: Aquarelle sur papier
  • Dimension: 45" x 26"
  • Collection: Collection privée
Homme au chapeau
  • Titre: L'Homme au chapeau
  • Medium: Aquarelle
  • Collection: Collection Lionel J. Duvalsaint
Montagne de feu
  • Titre: Montagne de feu
  • Medium: Aquarelle sur papier d'arches
  • Dimension: 26" x 20"
  • Collection: Collection de G. Germana
Oiseaux de cristal
  • Titre: Oiseaux de cristal
  • Medium: Aquarelle sur papier St-Gilles
  • Dimension: 7" x 14"
  • Date: 2012
  • Collection: Collection de G. Germana
Explosion
  • Titre: Explosion
  • Medium: Aquarelle sur papier d'arches
  • Dimension: 10" x 18"
  • Collection: Collection de M.-J Péan
Timoun
  • Titre: Timoun
  • Date: 2012
  • Medium: Aquarelle sur papier d'arches
  • Dimension: 9" x 14"
  • Collection: Collection de M.-J. Péan
Pimentade
  • Titre: Pimentade
  • Medium: Aquarelle sur papier St-Gilles
  • Date: 2012
  • Dimension: 20" x 30"
  • Collection: Collection de M.-J Péan
Hommage  Emilio
  • Titre: Hommage Emilio
  • Medium: Aquarelle
  • Dimension: 20" x 27"
  • Collection: Collection de Joelle Et Ewald Prassel Allemagne

Les compositions épurées de ses portraits et sa manière de représenter le réel, souvent en gros plan, contribuent à les rendre plus vivants que nature. Ses personnages sont empreints d’une dignité sereine, voire d’une noblesse reflétant la nature de l’artiste. Au fil du temps, Irène François-Péan a développé un intérêt pour l’aquarelle abstraite ou non-figurative qui a marqué ses œuvres dans les années 1990. Se passant de modèles et s’affranchissant du devoir de représentation du monde dit « réel », ce volet important de son travail semble traduire par l’exploration des formes et des couleurs tantôt une certaine inquiétude existentielle, tantôt une quête de sérénité qui ont toujours habité l’artiste. Elle est revenue à l’aquarelle figurative dans la majorité de ses œuvres tardives; à partir de ce moment, ses tableaux de jardins et de fleurs ont mis l’accent sur la beauté de sa terre d’adoption.

Irène François-Péan est décédée à Québec (Canada) le 12 mai 2016. Intéressée jusqu’à la fin à l’art et à l’aquarelle, elle a légué à sa famille, une importante collection d’œuvres et de nombreux livres d’art. Les ateliers d’initiation à l’aquarelle qu’elle a animés à l’Alliance française ont guidé sa volonté de travailler à doter le Cap-Haïtien, d’un espace culturel destiné aux jeunes. Pas étonnant qu’elle ait exprimé le vœu que ses livres d’art puissent servir aux jeunes artistes du Cap-Haïtien, vœu que sa fille Marie-José, légataire universelle, travaille à concrétiser.

Stanley Péan avec la collaboration de Marie-José Péan

Références

1. Gérald Alexis, « Quelques grands aquarellistes haïtiens », Le Nouvelliste, 28 juillet 2015.

2. Gouvernement du Québec. Ministère des communautés culturelles et immigration. Regards sur 31 femmes artistes de la collection Tout l’Art du monde, 28 novembre au 22 décembre 1985, Place du Parc (Montréal). Catalogue de l’exposition, 31 Fiches par artiste. Préface de Élie Fallu, Ministre.

3. Gérald Alexis, ibid.

Cap-Haïtien, Aquarelle, Lycée Philippe-Guerrier, École des Soeurs bleues, René Vincent, Arts visuels, Irène François-Péan, Hélène Schomberg, Alexis Oswald-Durand, Tout l'Art du monde, Atelier d'aquarelle de Québec