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Cuisine Capoise

MANGER AU CAP-HAÏTIEN EN 1950-1960 ET TROIS RECETTES CAPOISES (MAX MANIGAT)

La cuisine capoise ne diffère pas beaucoup de la cuisine haïtienne en général mais elle possède ses spécialités. Il n’y a qu’à mentionner le mot : noix pour qu’immédiatement l’esprit se tourne vers le Cap. On dit que les Jérémiens, aussi, sont amateurs de ce savoureux légume mais pour tout le pays, la cuisine aux noix est capoise. Á la rue des Césars à Port-au-Prince, on trouvait, autrefois, toute une rangée de marchandes qui offraient : cassave Okap, cassave jijiri, cassave kokoye, noix kajou vertes, mangues fil blanc, les très douces oranges de Milot. En plus de ces spécialités exportées, nous aimions : le brigo (burgau), le cochon gra, les crabes : blanch, wouj, zoumba ; le doucounou à la façon des gens du Nord, les crevettes et les kribich, les kabo, le lanbi vert ou séché, les mangues de notre département surtout batis, doudous, janmari, wozali, ti bòzò ; le pannisik, le pendou , le longannis d’origine dominicaine, la pimantad de poisson : babaren, bekin, bous, boutou, kwokwo, karang, dorad, sad gri, sad woz (sarde rose) le favori; les sesin kabrit, le tatouni, le tchentchen sous toutes les formes, les ti kwokwo, les brigo, sirik, touloulou, wonma sòs kreyòl, ainsi que l’akasan nan fèy, l’ablen, l’amizman, les nwa griye (noix grillées), le lèt kaye (lait caillé), les do klere ; surtout les fruits : labapen, kowòs, kayimit, sapotiy (sapotilles), kachiman, ponm kannèl ; et aussi les mayi bouyi (maïs bouilli), mayi boukannen (maïs boucané) ; les topimanbo, kenèp, ponm lyann, yèsken, zanmann, ; et j’en passe, qui ne manquaient pas particulièrement en été. Les frères preneurs, amateurs de tranpe, ne négligeaient pas le janjòl, le salèz lanmori boukannen avec force piment. A Bréda, chez Ti Yotte, le sele bride et le kaka nen s’enlevaient rapidement.

Les restaurants d’un certain standard existaient mais qui avait les moyens de les fréquenter sinon occasionnellement ? Le spaghetti au jambon de Saïgoué à deux gourdes, le sandwich au poulet de Gros Louis au Café Colomb, les pâtés de Man Vicvic, faisaient nos délices les rares fois que le chat ne dormait pas dans nos réchauds. Par contre, les marchandes de fritay connues dans chaque quartier, dès la tombée de la nuit installaient leurs tables et attiraient des clients en bon nombre. A la rue 24 – G, en face du Ciné La Gaieté, le poisson frit et le duri ake pwa de Délivrance n’avaient pas leurs pareils. Les marchands de rue : bonbon siwo, konkonnèt, pate circulaient à travers les rues de la ville vantant leurs marchandises. Au Lycée Philippe Guerrier, akra pwa nèg, kasav ak manba, pen ak manba s’achetaient pendant la récréation Au marché Cluny, travailleurs et gagne-petit pouvaient se restaurer à bon compte. Riz, pois rouges, viande aux légumes, surtout le kòkonm mitonnen, s’offraient pour quelques gourdins. Une de ces cuisinières proposait du maïs moulu et du riz blanc partageant le même chaudron. Comment s’y prenait-elle pour réaliser un tel exploit ? Des épiceries renommées pour leurs jus de fruits comme chez Bidòs où les gamins s’amusaient à demander : yon ji kòk a Bidòs ak yon bòbòt a Man Bidòs. Il s’agissait, bien entendu, d’un jus de lait de coco et d’un petit pain connu sous le nom de bòbòt. Il y avait aussi, un sandwich au fromage Kraft, chez Philibert, avec des lanières de chou confites dans un pikliz à damner un saint. Les pains alo (à l’eau), aticho, bòbòt, bwèt, fwote, manchèt, etc. s’achetaient chez Bidòs Rémy, chez les frères Farano, chez Wilson Lucheng. Sucreries et friandises nous tentaient aussi : suk mant, bèrlengo, dous lèt, dous kokoye, dous ji kòk, dous pistach ; jenjanbrèt, bougonnen mayi, chanmchanm, lakòl, Bref, manger au Cap du temps de notre jeunesse était vrai un plaisir.

Voici trois recettes, traduites de l’anglais, de plats capois authentiques présentés par Marguerite Manigat Pauld dans son livre : La cuisine de Margot. Best Haitian Recipes. (2001), que nous savourions dans notre jeunesse :

LASOUP TÈT A KABRIT (pp. 32-33)

Cette soupe de tête de chèvre est une spécialité de notre maman. C’était celle qu’elle préférait et qu’elle nous servait le 1er janvier de chaque année.

Ingrédients : Pour 6 personnes : 1 belle tête de chèvre ou cabri, 1 kilo ½ de pommes de terre, 3 oranges sûres, 2 navets, ½ tasse de céléri haché, ½ tasse de poireaux hachés, ½ d’un petit chou, 1 kilo 1/2 de giraumont ou 500 grammes de potiron congelé, ½ tasse de spaghetti ou de vermicelle, thym, cive, persil frais, 3 gousses d’ail pilées, ¼ de tasse d’oignons hachés, 5 litres d’eau 2 cuillerées à soupe de beurre ou de margarine, Sel, poivre ou piment fort au goût

Nettoyer la tête de cabri et frottez-la avec les oranges sûres. Réserver un peu de jus pour mariner la tête. Assaisonnez-la avec l’ail, les herbes fines et les épices. Dans une grande casserole ou une chaudière, faire cuire la tête de cabri sur feu doux pendant une heure ou jusqu’à ce que la viande soit tendre. Retirer la tête du bouillon. Mettre de côté. Éplucher, giraumont, carottes, navets, pommes de terre. Ajouter le chou. Couper les légumes en morceaux et faire cuire dans le bouillon de tête de cabri. Quand le giraumont est cuit, l’écraser et l’ajouter au bouillon. Les légumes cuits ; désosser la tête de chèvre. Ajouter la viande, le spaghetti ou vermicelle et les oignons sautés dans le beurre ou la margarine. Ajuster l’assaisonnement. Laisser mijoter pendant cinq minutes. Servir chaud. Ne pas laisser la soupe s’épaissir. On nous a laissé entendre que cette soupe est connue et appréciée au Pont l’Estère.

POULET AUX NOIX (pp. 127-128)

Pour six personnes

Ingrédients :

  • 1 beau poulet coupé en morceaux, 2 citrons, l’orange sûre, 1 tasse d’eau, ½ tasse d’huile, 3 clous de girofle, 1 gros oignon tranché, Ail frais, cive, persil, thym, ½ piment fort (piman bouk) 500g. de noix de cachou vertes* Sel au goût.
  • Nettoyer le poulet. Frotter avec du citron ou de l’orange sûre. Rincer à l’eau bouillante puis assaisonner avec les épices et le jus de citron. Laisser mariner quelques heures ou pendant toute la nuit.

    Dans une chaudière avec couvercle, porter l’huile à haute température ; y déposer le poulet morceau par morceau, et faire bien roussir. Ajouter la marinade et un peu d’eau. Cuire couvert pendant vingt-cinq minutes jusqu’à ce que le poulet soit tendre. Tremper les noix vertes dans l’eau froide toute la nuit. Les cuire une heure sur feu doux, puis les égoutter. Réserver ½ tasse de l’eau de cuisson des noix vertes. Ajouter cette eau et les noix au poulet cuit. Mettre des tranches d’oignons et laisser mijoter dix minutes. Servir avec du riz et pois rouges, du riz au djondjon, de la polenta aux pois rouges ou du riz blanc.

    * Les noix kajou (d’acajou ou de cachou) vertes se mangent à toutes les sauces au Cap: bouillon, lambi séché, pintade, pois rouges en sauce, poisson, porc, poulet, riz aux légumes, etc.

    "Crabe rouge Touloulou"

    VIANDE DE BŒUF ET TOULOULOU AUX CHOUX CARAÏBES (pp. 59-60)

    Ingrédients: Pour six personnes.

  • 500g. de bœuf coupé en cubes, 250g. d’os de porc (cou), 250g. de porc salé avec os, 4 grosses bottes de choux caraïbes 1 dz. de touloulou (petits crabes), 1 tasse ½ d’huile, 4 citrons, Thym frais, Persil, ail, cives pilés, 3 tasses d’eau, 1 gros oignon coupé en tranches, 1 cuillérée à soupe de sel, Piment.
  • Nettoyer puis assaisonner la viande avec le sel, l’ail, les herbes fines, les épices et le jus de citron. Faire roussir la viande en tournant fréquemment. Ajouter les quatre tasses d’eau et cuire à feu doux environ trente minutes ou jusqu’à ce que la viande soit tendre. Enlever et mettre la viande de côté en laissant le jus dans la chaudière. Si on met des touloulou, les nettoyer et les faire roussir dans le jus de la viande. Les mettre de côté avec la viande. Bien rincer les choux caraïbes sous un robinet d’eau courante. Les ajouter au jus de la viande, Cuire jusqu’à ce qu’ils soient tendres et que toute l’eau soit évaporée. Écraser les choux caraïbes. Mélanger viande et touloulou avec les légumes. Ajouter le piment et les tranches d’oignon. Servir avec du riz blanc, avocat et des bananes plantain bouillies.

    Bon appétit !

    Sources : Extrait de : Cap- Haïtien. Excursions dans le temps : Au fil de nos souvenirs, Marguerite Manigat Pauld et Max Manigat (Naples & Miramar, Floride, États-Unis). Éditions Sanba, 2014.
    Recettes capoises extraites de Marguerite Manigat Pauld : La cuisine de Margot. Best Haitian Recipes. Montréal, CIDIHCA, 2001.
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